Pour mamie
Voilà, ma grand-mère est partie. On l'a enterrée, puis on a rangé ses dernières affaires. Il y avait surtout des vieilles photos. C'est moi, le gamin qui suce son pouce, sur la plage d'Etretat. On y était allé en BMW E30... Qui était un tout nouveau modèle à l'époque.
J'avais écris un petit discours pour l'enterrement :
"Comme disait Charles Trenet : « Elle a connu des paysages et des soleil merveilleux, tout là-bas, sous d'autres cieux. » Sans transition, la jeune fille de Casa est devenue une mère de famille à Paris, puis une grand-mère. Son monde a beaucoup bougé depuis le Maroc du protectorat et cela faisait longtemps qu'elle avait du mal à suivre cette ronde perpétuelle... Elle s'était faite son propre monde, plein de contradictions. Elle avait du mal à comprendre que les temps ont changé, que la société a muté, que les mentalités ont évolué... Mais ma grand-mère, c'était avant tout sa table. Jusqu'à très tard, elle nous a préparés du couscous, des « biscuits civils », son « omelette mamie » et sa tarte aux pommes. Les dimanches de mon enfance ont été ponctué de « repas chez mamie ». Le tout ponctué de « Mange, mon fils » et à la fin « ramènes-en chez toi. » C'est bien l'une des seuls fois où je la vois et où je ne repars pas avec un Tupperware ! Puis il y a eu la maladie. Cela faisait quelques années que ça ne tournait plus rond. Au début, ça nous faisait rire les prénoms hybrides de ses enfants et petit-enfants. Mais ce n'était qu'un début... Je l'appelais régulièrement. Une fois, c'était avant une fête familiale. Je lui donnais donc l'heure et le lieu de rendez-vous. Elle note, puis elle dit : "Au fait, tu es qui ?" Ca m'avait fait très mal, sur le coup : c'était un signe que sa maladie s'était empiré. C'est là que j'ai compris que désormais, elle serait loin. Et que c'était un voyage sans retour. Ce n'était plus ma grand-mère. La dernière fois que je l'ai vue, il n'y avait plus personne. C'était comme écrire avec un vieux Bic. Vous avez beau écrire et réécrire, il n'y a rien qui reste sur le papier.
Dire que quelques années plus tôt, elle voulait m'aider à porter les cartons de déménagement !" Cette femme octogénaire, puis nonagénaire, que tout le monde imaginait devenir centenaire... On disait que c'était une vraie force de la nature. Et maintenant, c'est fini.
Commentaires
Enregistrer un commentaire